Sciences et technologie
RENCONTRE: Vergie, lauréats du prix Injaz El Arab.
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Vergie est une startup lancée par quelques étudiants tunisiens dans le cadre du programme de « INJAZ Company Program ». Cette jeune entreprise est la gagnante de la 8éme édition de la compétition régionale de « Injaz El Arab », « Les Entrepreneurs de Demain» , qui s’est tenue en Egypte.
Nous avons interviewé Ghada Kannou, « Public Relation Manager » de Vergie pour en savoir plus sur leur startup ainsi que leur vision vis-à-vis de l’entreprenariat.
– Ghada pourriez-vous nous parler de Vergie ?
Tout d’abord la nomenclature de Vergie découle de l’énergie verte. Les messages de sensibilisation de la Société Tunisienne de l’Electricité et du Gaz (STEG) nous ont inspirés à tenir compte du sujet de l’énergie et à chercher des solutions afin de diminuer la consommation d’électricité chez les tunisiens. L’idée de Vergie, qui a été construite en été dans le cadre de« Injaz Company Program »,consiste à générer de l’énergie à partir d’une bicyclette magnétique. Au début, le produit était destiné,non seulement aux salles de sport, qui sont les majeurs consommateurs d’énergie, mais aussi aux personnes qui pratiquent du sport chez eux.
– Est-ce que vous vous contentez de générer de l’énergie électrique, ou bien vous la stockez pour une utilisation ultérieure ?
L’utilisation instantanée de l’énergie générée n’est pas du tout une innovation.Par contre, notre tâche consiste à stoker cette énergie.En plus, on travaille sur des bicyclettes, ou plutôt des circuits qui s’adaptent aux besoins des consommateurs. Pour une utilisation limitée, on propose une batterie qui stocke 325 Watts, mais on a aussi un pack pour les salles de sport pour stocker 3000 Watts après seulement 30 minutes de pédalage.
–Est-ce-que votre produit est spécifique à des marques particulières de vélos magnétiques ?
Non, nous concevons un modèle de circuit spécifique au modèle de chaque acheteur selon sa consommation trimestrielle d’électricité.
-Vergie, une idée qui peut englober d’autres types d’énergie verte, est-ce que c’est le cas pour le moment ?
Pour l’instant, nous travaillons sur notre idée actuelle pour avoir enfin un produit complet et robuste. Nous voulons bien maîtriser cette technique avant de nous ouvrir sur d’autres idées.Cependant, nous voulons concevoir des systèmes qui fonctionnent pour des vélos normaux!
-Quelles sont les contraintes que vous avez rencontrées durant votre expérience ?
Les obstacles que nous avons rencontrés étaient essentiellement des problèmes financiers. Comme « Injaz » l’exige, notre capital doit être 100% social. Nous avons vendu donc des actions de 5 dinars seulement pour pouvoir gérer nos besoins. D’ailleurs,les pièces étaient chères,ce qui nous a menés à penser à établir des partenariats avec les fabricants pour limiter le coût de confection. Sinon,la couverture médiatique était moins présente qu’on ne l’attendait. La télévision tunisienne était absente. Le gouvernement tunisien n’a fourni aucune aide ou support même après que nous ayons gagné le concours en Egypte, ce qui était décevant.
-Vergie a déjà commencé le travail !
Le travail a commencé depuis la conception de l’idée de Vergie, avant même la compétition nationale d’Injaz. Je trouve que c’est devenu plus difficile après avoir gagné les deux concours parce qu’il faut maintenant nous installer sur le marché tunisien.
-Avez-vous commencé à collaborer avec des salles de sport?
Oui. Nous avons fait une étude de leurs consommations d’électricité pour avoir un produit qui satisfait leurs besoins. Nous allons bientôt signer des contrats avec des salles de sport, mais pour des raisons de confidentialité, nous ne pouvons pas citer des noms pour l’instant. Cependant, un prototype a été vendu à un simple client ; j’insiste que nous vendons non seulement aux salles de sports mais aussi aux individuels.
-Quel est le feedback des consommateurs?
Nous n’avons reçu aucune plainte jusqu’à maintenant à notre service client. Au contraire, nos clients sont très satisfaits.
– Quand avez-vous commencé? L’été dernier n’est-ce pas?
Oui, exactement ; en Juillet 2017.Et c’était un avantage :nous étions la startup la plus jeune dans la compétition avec beaucoup de potentiel. Le jury était ébloui par le progrès que nous avons fait : passer d’un prototype qui génère 325 Watts en 2 heures de pédalage vers un prototype de 3000 Watts en seulement 30 minutes de pédalage !C’était d’ailleurs le prototype gagnant de la compétition ; ce qui nous a donné un coup de pousse pour gagner le prix.
-Comment envisagez-vous de protéger votre idée au niveau international? Et est-ce que vous avezplanifié de vendre votre produit sur le marché international ?
Le dépôt de la marque va être fait très bientôt à l’échelle nationale et internationale. Sinon, en ce qui concerne l’ouverture sur le marché international, notre compatibilité avec ce marché était parmi les critères du jury de la compétition régionale. Je vois que notre prototype aura de fortes chances de traverser les frontières parce que tout le monde s’intéresse à produire sa propre énergie et minimiser ses dépenses d’électricité. De plus, faire du sport est la tendance partout dans le monde.
-Ghada, sur le plan personnel, comment avez-vous trouvé l’entrepreneuriat?
Cette expérience a influencé ma personnalité : j’étais très timide, mais maintenant je suis très sociable et je me sens plus mature. Mon poste de Public Relation Manager m’a permis de m’améliorer puisque c’est un rôle qui exige que je parle à n’importe quelle personne de notre startup pour introduire celle-ci aux gens et pour élargir notre base de clients. L’entreprenariat m’a donc permis de découvrir mon potentiel sur le plan social ainsi que professionnel. C’est un outil pour savoir communiquer et interagir avec les autres. Dans notre parcours, nous avons trouvé beaucoup de gens qui nous encouragent, d’autres qui ne voient que le mauvais côté des choses. Il faut donc savoir entendre leurs méfiances et les prendre en considération pour s’améliorer, et surtout pour ne pas tomber dans le piège du désespoir. Il ne faut pas du tout lâcher prise.
-Faire ses études dans le domaine de la gestion est-il indispensable pour avoir une startup?
Non.Notre équipe renferme des ingénieurs d’autres universités :un ingénieur de l’université privée « ESPRIT », et notre « Graphic Designer » est une étudiante en nutrition. Son domaine d’étude n’a rien à voir avec celui de Vergie ou de la gestion. Elle a déjà sa propre startup. Donc le domaine d’étude n’est pas vraiment un critère pour être entrepreneur. D’ailleurs, certaines personnes n’ont pas fini leurs études, d’autres sont formées dans des domaines techniques mais ont réussi à relever le défi et à concrétiser leurs idées. L’entreprenariat demande une prise de conscience de l’environnement où nous sommes. Il faut savoir analyser le besoin et aller jusqu’au bout.
-Un mot pour « Injaz »?
Je tiens à remercier « Injaz »et spécialement M. Wassim Ben Romdhan et tous les autres coachs pour leurs efforts. Nous avons commencé sans idée ni expérience, mais par leurs encadrements, ils ont su nous guider lors de la conception de l’idée de Vergie. Ils nous ont permis d’avoir plus de contacts que si nous avions travaillé tous seuls. Je me souviens aussi qu’ils étaient stricts. Mais, la discipline imposée nous a menés vers le succès régional. Je crois que c’est un domaine [celui de l’entreprenariat] qui exige d’être discipliné et rigoureux pour réussir.
–Y’a-t-il une histoire ou une anecdote qui va être gravée dans votre mémoire pour le reste de votre parcours ?
Au moment de l’annonce des résultats de la compétition régionale, le jury a annoncé que Vergie est la startup victorieuse. Notre nom était partout sur les écrans, mais nous n’avons pas pu le comprendre. Nous sommes restés assis, applaudissant, alors que nous devions rejoindre le jury pour prendre le trophée. Nous avions tous eu la même réaction, toute l’équipe. Nous n’avions pu comprendre ce qui s’est passé que quand tous les présents nous ont appelés par notre nom de startup pour rejoindre le jury.
Ali Hamouda & Mariem Khlifi